mercredi 26 août 2009

Souvenir

ALBERT GARCIN, boulanger de Peypin et Résistant du Maquis du Luberon.

Albert, fils de Marie et de Julien, époux d’Henriette et père de Régine, était engagé dans la Résistance alors que la France vivait sous Vichy et l’occupation allemande. Il meurt, lors d’une mission, le 17 août 1944, avec d’autres maquisards sur la route entre Saint-Martin de la Brasque et La Tour d’Aigues . Chaque année, une cérémonie a lieu, le dimanche qui suit le 17 août, sur le lieu où sont morts les Résistants, et où été érigée une stèle à leur mémoire. Cette année, le discours qu’avait prononcé le maire de Peypin en 1945 à été lu dans son intégralité. Le voici :


Mesdemoiselles, Mesdames, Messieurs, chers amis


Le 17 août 1944, il y a maintenant un an aujourd’hui, en ce même point où nous nous trouvons réunis, quatre des nôtres, du Mouvement de la Résistance, dont trois du groupe de Peypin d’Aigues, tombaient, victimes de leur dévouement. Partis de Peypin d’Aigues en automobile sur un ordre supérieur et se rendant à La Tour d’Aigues, ils furent mitraillés par un avion.
L’un d’eux transporté immédiatement à Manosque nous est resté inconnu. Nous unissons sa mémoire sacrée à celle de ses camarades.
Le deuxième c’était DANTE GIORDANO venu quelques mois auparavant de Marseille à Peypin d’Aigues pour soustraire sa famille aux dangers des bombardements. Il s’était joint d’enthousiasme à notre mouvement mettant sa voiture à notre disposition. Puis, il était rentré à Marseille où il était réquisitionné pour transporter les officiers.. Le 16 août, il pressentit que l’heure d’agir avait sonné. Trompant adroitement la surveillance du planton allemand qui l’accompagnait et le surveillait, il avait gagné le large se dirigeant vers Peypin d’Aigues, coupant à travers champs lorsqu’un barrage coupait la route, s’engageant au mépris du danger sur le pont de Cadenet, et arrivant à Peypin d’Aigues, heureux d’avoir sa propre voiture dans laquelle il transportait ses propres camarades.
Le troisième, hélas, était notre bon, notre cher ALBERT GARCIN, notre brave Bébert.
Récemment installé comme boulanger dans son pays natal avec sa jeune femme, son foyer venait d’être embelli par la naissance d’un magnifique bébé qui promettait à la famille la continuité et la prospérité. Intelligent, actif, dévoué, Albert avait été placé à la tête d’une des trois sections que comportait notre Groupement.
Généreux et fraternel, il apporta au Maquis un concours dévoué, fournissant sans compter, les corbeilles de pain aux réfractaires. Méprisant le danger, il ne reculait devant aucune mission, et c’est ainsi qu’il avait immédiatement répondu présent à l’appel qui devait le conduire à la mort.
Enfin, le dernier, c’était le chef lui-même : c’était ANDRE ARNIAUD, notre toujours regretté Dédé dont la perte a causé dans la vie du village un vide douloureux que chacun a ressenti et que rien n’a comblé. On avait apprécié depuis longtemps sa vive intelligence, un enthousiasme pour tout ce qui lui semblait grand et généreux.. Ce 17 juin 1040, son cœur de français avait été profondément blessé par la voix chevrotante du sinistre vieillard annonçant la demande d’Armistice conclu, disait-il, dans l’honneur et qui, en réalité, consacrait le déshonneur et la honte de la France..



Mais dès le lendemain, André entendait une autre voix, une voix venue d’Outre-Manche, qui affirmait
, avec force, que " si la France avait perdu une bataille, elle n’avait pas perdu la guerre ", que les mêmes amis qui avait fait la force de l’Allemagne pouvaient se tourner contre elle. Cette voix, retentissante et prophétique, la voix du Général De Gaulle sonnait à travers l’espace, le ralliement des forces saines du pays pour mener la lutte contre l’envahisseur. Elle trouva, dans l’âme d’André, un écho immédiat. Il se mit à l’œuvre consultant ses camarades, les exhortant, les exaltant, organisant ensuite son groupement qui se trouve bientôt composé de gars solides et résolus.
A ce moment, le Luberon se peuple de maquisards venus d’un peu partout. André se dépensera sans compter et piégeur d’une adresse remarquable, il connaissait tous les sentiers, tous les rochers, toutes les combes de la montagne. Admirablement secondé par sa jeune femme, il ravitaillait et dirigeait souvent les bandes de réfractaires. Il était cependant lui-même obligé à la plus grande prudence.
Dénoncé par le couple infâme auquel Vichy avait livré la commune de Peypin, il lui arrivait souvent de voir surgir devant son habitation une auto. C’était la Gestapo ou la Milice.
André disparaissait aussitôt et gagnait le maquis et cela avec beaucoup d’autres patriotes comme lui. Tout le monde, à Peypin, savait cela. On savait aussi qu’André, sans ambition personnelle, n’obéissait qu à son devoir. Aussi, malgré sa jeunesse, était-il écouté et obéi, même par les plus anciens.
Un de ses plus beaux jours de Résistant fut celui où il distribua les armes à son groupement.
Un instructeur spécial vint enseigner clandestinement la manière de s’en servir. Ce jour-là, André fit de magnifiques projets. Il ne devait, hélas ! les réaliser : la mort l’a fauché en pleine action.
Familles affligées, soyez fières de son épouse, de vos frères, de vos enfants : ne reculant devant aucun danger, ils ont héroïquement accepté de remplir leur devoir pour la libération de la Patrie. Toute notre sympathie et notre reconnaissance vous sont acquises.
Cet endroit où sont morts nos camarades, est désormais sacré. Déjà, le jour de la Victoire, nos voisins et amis de Saint-Martin sont venus y déposer des fleurs. Qu’ils soient remerciés pour ce geste pieux et fraternel.
A notre tour, nous le consacrons par l’érection de ce monument que nous nous proposons d’entretenir et d’embellir. Pour cela je fais appel aussi à la Municipalité et au Comité de Libération de Saint-Martin, le Monument reposant sur son territoire, de bien vouloir y veiller avec soin. Il rappellera aux passants et aux générations futures, la mémoire des enfants de Peypin morts au service de la Patrie. Il sera comme un symbole de la guerre du Maquis dans notre région, comme un symbole aussi de l’union qui régnait entre les maquisards.
Ils ne s’embarrassaient pas des discussions politiques, encore moins des jalousies personnelles : tous marchaient d’un même cœur, animés d’une même pensée : la Libération de la Patrie. Etroitement unis dans la vie, ils l’ont été plus étroitement encore dans la mort.
Puisse leur exemple ne pas être perdu ; qu’aux heures agitées que nous vivons, on évoque la mémoire de nos héros, que le souvenir de leur sacrifice fasse taire les passions et nous soit une leçon de patriotisme, pour que plus grande, plus noble et à jamais immortelle :
VIVE LA FRANCE

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